Au sein du club d’échecs de Genève, elles ne sont qu’une trentaine de femmes parmi 170 membres. Au sein de la Fédération suisse : environ 7% des licenciés sont des femmes. Un constat d’échec? «C’est une question ancienne et délicate. Depuis 1950, la fédération internationale prend des mesures, mais les résultats restent faibles, s’avance Patrice Delpin, co-président de la fédération genevoise d’échecs (FGE). Les mesures de discrimination positive sont nécessaires.»

Des prix spéciaux féminins sont toujours distribués dans les compétitions genevoises, suisses et internationales. «Je comprends l’intérêt pour encourager la présence féminine, même si parfois nous nous retrouvons qu’avec une seule femme lors de certains tournois, explique le co-président. Peut-être que former davantage de monitrices peut être une piste pour booster la pratique féminine.»

À la base de l’échiquier, la discipline semble avoir moins de barrières à la mixité. «Nous sommes contre le fait de séparer les filles et les garçons lors des cours, souligne Patrice Delpin. La fédération genevoise donne des cours dans 70 classes du DIP pendant les heures de maths (45min) et atteint ainsi de nombreuses filles. De plus, l’École d’échecs de Genève est spécialisée dans les cours pour enfants et propose des stages ».

Mais ce n’est pas tout. Le cheval de bataille de la FGE est de promouvoir une ligne inclusive plus large. Six groupes au sein des classes spécialisées (OMP) reçoivent des cours d’échecs, que ce soit des jeunes en situation de handicap moteur ou mental. «Cet été, le Club d’échecs de Genève a proposé un stage gratuit à de jeunes migrants, ajoute Patrice Delpin. La FGE réfléchit même à la possibilité d’organiser des cours d’échecs dans des prisons.»

«L’idée de l’inclusion est d’essayer de ne pas se focaliser sur un public particulier et de se pencher sur le concept d’accès au sport, qui est la plus grande problématique, explique Stéphane Jacquemet, responsable de la commission accès au sport de l’AGS. Il faut permettre aux publics plus éloignés – santé, finance, ou une image d’eux-mêmes qui les freine – d’accéder aux clubs et aux installations sportives.»

Et cette notion d’accès au sport doit être pensée en match aller-retour. «Un club handisport devrait aussi réfléchir à la manière d’inviter des valides à jouer», estime Stéphane Jacquemet. La commission d’accès au sport de l’AGS a justement été créée dans le but d’accompagner les projets et de valoriser les bonnes pratiques afin de les étendre. «C’est en premier lieu l’élément déclencheur qui nous intéresse, puis la manière de communiquer et enfin ce que les clubs ou fédérations font au niveau de la formation des moniteurs», détaille le responsable de la commission.

Pour revenir à la question du genre aux échecs, un projet de centre de performance régional exclusivement féminin est à l’étude sur La Côte. «Les exigences cantonales sont trop contraignantes pour un tel projet à Genève», explique Patrice Delpin, qui rappelle que le bénévolat a des limites et qu’il est difficile actuellement de se projeter vers l’avenir à cause de la pandémie en cours. Mais la FGE avance gentiment ses pions pour davantage d’inclusion.

Sylvain Bolt

 

Photos © Allan Cosandier & Patrice Delpin