Marie Barbey-Chappuis: "Mon objectif est d'investir l'espace public avec des activités sportives"

Le titre du Genève-Servette Hockey Club, la victoire en Coupe de Suisse de Servette Football Club Chênois féminin et la deuxième place du Servette FC en Super League de football. Le mois de mai, votre dernier en tant que Maire de Genève, s’est terminé en apothéose.

Oui, on peut le dire! J’avais d’ailleurs placé cette année de la mairie sous le signe du sport. L’idée était de développer différents projets sportifs ces douze derniers mois. Cette fin en apothéose, on la doit au seul mérite des sportives et sportifs qui ont réalisé des magnifiques résultats. Ce sont des moments extrêmement réjouissants qui font la fierté des Genevois. Ces exploits des sports collectifs professionnels vont aussi donner du vent dans les voiles du sport amateur, vu qu’ils se nourrissent l’un de l’autre.

 

Ces succès vont-ils également susciter des vocations pour le hockey sur glace ou le football féminin ?

Les enfants genevois ont besoin de modèles. Voir des champions dans de nombreux sports va certainement susciter des vocations et c’est une magnifique vitrine. C’est très réjouissant pour la suite. Ces titres doivent aussi laisser un héritage. Aucun autre domaine ne parvient à créer autant de ferveur et de liesse populaire que ces victoires sportives. Il faut qu’ils renforcent encore la passion pour le sport à Genève, afin qu’elle devienne une ville sportive avec un engouement partagé par la population.

 

Est-ce dire que vous voulez surfer sur la vague de ces succès?

Ces succès du sport genevois impliquent aussi des responsabilités pour les collectivités, qui doivent proposer des infrastructures à la hauteur des ambitions de ces clubs et équipes. La Ville de Genève met des moyens importants et nous essayons d’accélérer la cadence, car nous n’avons pas assez investi dans les infrastructures sportives ces dernières années.

Le titre historique du GSHC a été célébré dans une patinoire des Vernets vétuste. Permettra-t-il de faire avancer le dossier de la future patinoire?

Je l’espère. C’est un dossier qui est piloté par le canton, mais la Ville de Genève est membre du groupe de pilotage. J’espère que ça va plaider encore plus fort pour une nouvelle patinoire qui soit à la hauteur du niveau qui est présenté par la première équipe et de ses ambitions. Que ce titre permette de convaincre les plus sceptiques de notre nécessité d’avoir des infrastructures à la hauteur de nos clubs. Car la ferveur favorise également la cohésion entre les habitants.

 

Plusieurs associations membres de l’AGS décrivent une ville saturée par les pratiques sportives et des manques évidents de salles et de créneaux horaires…

Le constat est tout à fait partagé. De nouveaux sports émergent et s’additionnent. Nous avons une croissance démographique et davantage de femmes et de seniors qui font du sport, ce qui est réjouissant. Mais cela met sous pression nos infrastructures. C’est pour cela que nous avons mis en place un ambitieux plan d’investissement pour les installations sportives à Genève. Il prévoyait 300 millions d’investissement d’ici à 2030. Ces trois dernières années, plus de 100 millions ont déjà été votés par le conseil municipal et ont été investis.

 

Quels sont les principaux projets?

Le nouveau centre sportif des Eaux-Vives, avec un budget de 70 millions, est prévu pour 2025-2026. C’est la première fois depuis 30 ans que l’on va inaugurer un nouveau centre sportif en ville de Genève. Ce sera également la première fois que l’on va construire qu’un tel centre verra le jour au coeur même de la ville de Genève, sur l’axe du Léman Express. L’idée est de placer le sport au centre de notre ville et c’est un signe important symboliquement.
Nous avons aussi lancé les travaux pour une nouvelle halle de tennis couverte au Bois-des-Frères, une salle de tennis de table et de judo. La maison du sport est un autre projet prévu sur ce lieu. Puis, la rénovation de la patinoire des Vernets va démarrer, pour la mettre en conformité. Ces quatre projets représentent ces plus de 100 millions votés. Et nous entrons dans le concret puisque les chantiers ont démarré au début 2023.

Et la suite?

Le centre sportif du Bout-du-Monde est le prochain gros projet, avec un budget de plus de 100 millions. Nous visons l’horizon 2029 pour la mise en service. L’objectif est de détruire le pavillon existant du Bout-du-Monde et d’en reconstruire un neuf, qui intégrerait des installations sportives pour l’athlétisme, une salle omnisport, mais aussi un bassin de 50m. Des salles d’escrime et une halle intérieure pour la pratique des sports urbains sont également prévus, notamment pour le skateboard.

Nous avons également engagé des études pour des rénovations des piscines de Varembé et des Vernets, ainsi qu’un crédit de construction pour la Queue-d’Arve, qui devrait être déposé au début de l’année prochaine pour y installer une salle de plus de 3’000 places. Elle répondrait à un manque et permettrait d’accueillir des manifestations nationales d’envergure.

 

La mise en place d’une maison du sport, qui devrait notamment abriter le siège de l’AGS, était-elle devenue nécessaire?

Oui, ce projet s’inscrit dans notre politique de soutien aux bénévoles, si précieux et indispensables dans le monde sportif. Aucune manifestation ne pourrait voir le jour et aucun club ne tournerait sans leur apport. La maison du sport est un lieu qui sera fait et pensé pour eux. Ils pourront y trouver des salles pour organiser leur comité, un soutien dans leurs tâches administratives et des formations y seront organisées. Le chargé de prévention sera également sur place.

 

Êtes-vous inquiète par le manque de bénévoles au sein des associations sportives?

La crise du bénévolat n’affecte pas seulement le sport. Dans tous les domaines associatifs, cela devient de plus en plus difficile de trouver des bénévoles. Je ne leur lance pas la pierre, parce que nos rythmes de vie deviennent de plus en plus intenses. Ce n’est pas facile de trouver du temps pour s’engager dans une activité bénévole. Notre responsabilité en tant que collectivité est d’essayer de les soutenir dans les démarches administratives. Mais aussi de valoriser et de reconnaître leur travail. Dans ce sens, nous avons organisé la fête des bénévoles du monde sportif. Une soirée organisée pour les remercier et leur faire honneur.

 

Vous avez également comme ambition de sortir le sport des salles…

C’est effectivement un autre axe sur lequel nous travaillons. Faire en sorte que Genève devienne en quelque sorte une salle de sport à ciel ouvert et de ne pas attendre que les gens franchissent la porte de nos installations sportives, mais d’aller à leur rencontre. Mon objectif est d’investir l’espace public avec des activités sportives. Lors des manifestations sportives, il faut travailler avec les clubs et les associations pour mettre en valeur ces clubs et faire en sorte que cela donne envie à des jeunes et des moins jeunes de se lancer dans une activité sportive. On l’a fait avec l’Asphalte qui met les sports urbains à l’honneur cet été. Mais nous avons aussi récemment soutenu une démarche du unihockey genevois qui a proposé des initiations sur les quais. Et nous nous réjouissons d’organiser la seconde édition de la Fête du sport avec l’AGS, après le succès de l’édition 2022.

Sylvain Bolt